lundi 27 août 2007

Chaînons manquants

Catherine Bailhache : Est-ce que dans la salle, quelqu'un a envie ou besoin d'intervenir ? En tous cas, n'hésitez pas...

(Quelqu'un dans la salle prend le micro)

Anne-Sophie Le Tourneur : Je m'appelle Anne-Sophie Le Tourneur et je représente une association de création audiovisuelle (image, cinéma, son). On a créé cette association il y a quatre ans, en partant du principe que le cinéma c'est un art collectif. On se demandait pourquoi dans le cinéma, il y avait toute cette industrie. On voyait bien que les réalisateurs en région, même avec une boîte de production, devaient se battre et le faisaient chacun dans leur coin. On n’est pas contre le sytème, c’est un bon système, des films se font, mais pourquoi ne se passe-t-il rien du côté de l'associatif, alors que dans tous les autres secteurs culturels, c'est là que se trouve le terreau, c'est là que se passent des choses, que se fédèrent les gens ?... Je pense que ce chaînon associatif manque. C'est peut-être la clé à nos réponses pour amener les gens à aller au cinéma, à découvrir un autre cinéma.

Eduquer à l'image, c'est essentiel dans notre monde qui est bouleversé par les images. Grace à des systèmes comme Collège au cinéma et Lycéens au cinéma, on apprend à découvrir, à décrypter ces images. Mais on n'a pas appris aux personnes plus âgées. C'est important, cela permet de s'ouvrir sur d'autres choses. La question de l'éducation à l'image est essentielle pour la société entière aujourd'hui. C'est quelques chose qu'il faut mettre en place à tous les niveaux.

Ensuite, concernant les critiques, quand vous dites, que les gens ont une défiance par rapport aux critiques, je ne sais pas. Peut-être les personnes qui réfléchissent… il y a aussi une forme de reconnaissance peut-être aussi, ne serait-ce que parce qu’ils portent un regard sur nos films.

Catherine Bailhache : C’est-à-dire que là vous parlez depuis la place de réalisatrice ? En tant que créatrice ?

Anne-Sophie Le Tourneur : Oui.

Catherine Bailhache : C'est-à-dire que vous, vous attendez, contrairement à Albert Serra qui disait autre chose tout à l'heure, qu'une critique, dans un sens, serve de passerelle entre vous, votre film, et les autres ?

Anne-Sophie Le Tourneur : Nous, enfin… je m'occupe plus de la partie administrative de l'association.

Quelqu'un comme Fabrice nous a accueilli pour la première projection du premier documentaire que l'on a réalisé ; il nous a d'abord dit qu'il fallait faire des essais techniques et puis : « On verra si le film nous plaît ». Ensuite il nous a accueillis et au final, on était 130 dans cette salle. Il y avait des réalisateurs, des gens de la création, il y avait des amoureux du cinéma, des personnes qui n'avaient rien avoir avec le cinéma. Mais il n'y avait personne pour accompagner le film.

Certes, on est dans l'associatif, mais il y a toujours le problème de savoir ce que l'on va faire de ce film après, on a envie de le montrer, de le présenter dans des lieux comme des écoles pour expliquer comment on a construit le film.

Quand je dis que j'attends le regard d'une personne sur le film, c'est que l'on sait que pour relayer l'information, c'est important. Pourquoi souhaite-t-on inscrire les films dans les festivals ? C'est parce que l'on suppose qu'il y aura plus de gens à voir notre travail, le système actuel est comme ça.